[Flashback] Relève et Potins || Feat Cahya

Relève et PotinsFeat Cahya
L’après-midi pointait le bout de son nez lorsqu’Evelyn décida qu’elle s’était assez entraînée pour le moment. Elle avait relevé trois défis, ce matin, le troisième étant un peu plus coriace que les autres, à son grand bonheur. Mais elle en avait eu marre de toujours faire la même chose, aussi avait-elle mis fin à sa séance de combats. Elle fit un tour aux dans sa chambre pour se changer, en profitant pour remettre ses longs cheveux de jais en place, puis se rendit à la cafétéria, histoire de grignoter un peu. Un thé et quelques biscuits feraient l’affaire, juste de quoi se sustenter. Elle n’avait pas très faim.

La jeune femme eut juste le temps de finir son casse-croûte qu’un soldat vint lui annoncer que c’était à son tour d’assurer la relève des tours de garde. Elle le remercia d’un joli sourire, lui confia sa tasse en lui demandant, à l’aide d’adorables yeux de chaton, s’il pouvait la ramener pour elle, et s’engagea dans les couloirs sans fin du QG. Fredonnant une mélodie quelconque, elle recoiffa soigneusement ses boucles, songeuse. Elle avait été assignée à la garde de l’entrée de la Tour, chose rare pour un Tsviet. Mais cela ne pouvait être que bon signe. Aucune affaire grave ou urgente n’avait été déclarée, chacun pouvait donc remplir ses ordres de bas niveau le coeur léger. Il fallait bien avouer qu’après les lourds évènements qu’ils avaient dû encaisser, un peu de détente ne pouvait tuer personne.

Mais cela n’empêchait pas la jeune femme de s’ennuyer un peu. Après tout, elle était de nature active, elle aimait le combat, la violence, et même si elle appréciait souvent de ne rien faire de tel, elle finissait toujours par trépigner d’impatience. N’importe-quoi aurait pu la divertir, un imprudent qui se serait introduit chez eux, une visite de quelques soldats... Elle demandait juste à s’amuser.

Ce fut donc avec un soupir qu’elle atteignit son poste de garde. Elle put y apercevoir la présence d’un rouquin qu’elle connaissait légèrement, puisqu’ils avaient eu l’occasion d’échanger quelques mots par le passé. Elle l’aimait bien, ce petit. Oh, il devait sûrement avoir son âge, voire peut-être être plus âgé qu’elle, mais elle ne pouvait s’empêcher de donner à tout le monde un petit surnom, histoire de les agacer un peu, de les tester.

« Bonjour ! » le salua-t-elle avec un grand sourire. « Cahya, c’est bien ça ? Tu peux aller te dégourdir les pattes, je viens pour la relève. »

Elle alla s’asseoir juste en face de lui, sur une caisse, sans jamais se défaire de son sourire. Elle en profita pour l’étudier un peu. Il était un peu plus grand qu’elle, et ses cheveux de flamme contrastaient avec l’émeraude étincelante de ses yeux remplis de mako. C’était amusant de voir comme la mako pouvait avoir un effet différent sur les yeux selon les personnes. Les siens, par exemple, étaient de base de couleur améthyste, jusqu’à-ce-qu’un bleu-vert étrangement envoûtant ne vienne entourer ses pupilles, laissant au violet le soin de contraster en l’encerclant. En continuant son analyse, et détailla l’immense lance que tenait son vis-à-vis. Ainsi préférait-il la force à l’agilité. Elle nota ce détail dans un coin de sa tête, au cas-où ils s’entraîneraient ensemble un jour.
Puisqu’il ne semblait pas vraiment décidé à bouger tout de suite, elle engagea la conversation.

« Ça m’a l’air d’être plutôt calme aujourd’hui, » dit-elle en observant la porte. « Ça change des évènements récents. »

Relève et PotinsFeat Cahya


Evelyn regarda le jeune homme se redresser avec une grimace. Sans doute était-il resté sans bouger pendant un certain temps. Au début d’une garde, les soldats marchaient, généralement, tournant en rond pour essayer de ne pas s’engourdir. Mais cela devenait vite lassant, lorsque rien ne se passait. Elle l’observa s’étirer, songeuse. Elle se demandait quel âge il pouvait bien avoir. Oh, sans doute l’avait-elle su, mais ce n’était pas le genre de détail qu’elle retenait sur une personne lorsqu’elle n’en voyait pas l’utilité.

Au vu de ce qu’il lui dit, il ne portait pas vraiment les humains dans son coeur. D’un côté, elle pouvait le comprendre : Deepground avait souffert, c’était certain, et ce pendant longtemps. Ils avaient mis du temps à se remettre de leurs blessures. Mais de l’autre, elle trouvait cela un peu inutile, étant donné qu’un grand nombre de personnes n’étaient pas au courant de leur existence, ou les avaient oubliés. En soi, c’était surtout la W.R.O., les responsables. De son côté, la jeune femme n’en avait pas grand chose à faire. Leurs dirigeants étaient de retour, et cela ne pouvait que prévoir un bon avenir pour eux. À ses yeux, les humains n’étaient que des jouets, lui permettant parfois de passer le temps, lorsque son souffre-douleur favori d’amour du nom de Martial n’était pas disponible. Mais sinon, elle ne s’embêtait pas à se soucier de leur existence. Lorsqu’ils ne venaient pas poser le pied sur leur territoire, du moins.

« Ils ne savent pas ce qu’ils font. Ils sont comme des petits chatons : curieux, têtus et téméraires, faisant le mal parfois sans s’en rendre compte. De toute façon, ils ne font pas long feu ici en général. »

Il s’accroupit, n’ayant finalement pas réellement bougé de son emplacement initial. Il semblait être plus ouvert à la conversation qu’elle ne l’aurait pensé, et cela l’arrangea : elle aurait ainsi moins de temps à passer seule, à attendre qu’un petit malin ne daigne se pointer. Il lui demanda son nom, ce qui la fit sourire. Tout le monde ici devait plus ou moins se connaître, mais retenir le nom de tous les soldats était impossible, à moins d’être hypermnésique. Peut-être se ferait-elle un peu plus connaître, lorsque la nouvelle de sa promotion se serait suffisamment répandue. Mais honnêtement, elle n’en avait pas vraiment quelque chose à faire, de savoir si les autres la connaissaient ou non. Beaucoup devaient au moins la connaître depuis son enfance comme étant la petite folle de service, la furie du combat.

« Je m’appelle Evelyn, » dit-elle enfin, un petit sourire étirant ses fines lèvres rosées, « et si je me souviens bien de ce que l’on m’a dit, tu es Cahya, n’est-ce-pas ? »

Heureusement, elle était tout de même capable de se souvenir du nom qu’on lui avait donné en guise d’ordre de mission.
La jeune femme porta son regard sur l’horizon que l’entrée cachée de la Tour pouvait leur offrir. Il faisait gris, comme toujours. La pollution de Midgar était telle que le ciel était constamment recouvert d’épais nuages grisâtres qui cachaient toute la lumière du soleil, si celui-ci se trouvait bien derrière cette sombre barrière. Elle resta un moment silencieuse, de nouveau plongée dans ses pensées, son monde qu’elle seule pouvait voir et comprendre, avant de parler d’un air presque absent qui n’affectait en rien sa perception de son environnement.

« Dis-moi, Cahyou, que penses-tu de tout ça ? Je veux dire, la W.R.O., ce fameux Genesis dont tout le monde murmure le nom d’un air plus ou moins mauvais... Et ces rumeurs à propos de la nature qui se dégraderait ? »

Sa question était bien vague, reflétant un peu son état d’esprit en ce moment. À vrai dire, contrairement à d’habitude, elle n’était pas d’humeur à embêter quelqu’un, mais plus à... comment dire... philosopher ? Oui, peut-être. La vision morose de la ville et de ses débris lui rappelait ce qu’ils avaient vécu, les souffrances qu’ils avaient endurées. Sans doute ressentait-elle plus ou moins le besoin d’en parler avec quelqu’un puisque son grand-frère de coeur n’était pas là. Pas de chance, c’était sur Cahya que cela tombait.

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Elle ne put s’empêcher de sourire malicieusement en l’entendant se plaindre du surnom qu’elle lui avait donné. Elle adorait embêter les gens, et lui était tombé dans le panneau. Mais elle décida cependant de ne pas enfoncer le bouchon plus loin. Il semblait être un bon compagnon de discussion, se dit-elle en l’écoutant presque marmonner contre les humains, et elle avait besoin de passer le temps.

« Oh, tu étais de ceux chargés de surveiller Genesis ? C’est vrai qu’il baragouinait des choses à propos de la Déesse. S’il ne marchait pas aussi droit, on aurait pu croire qu’il avait eu la main lourde sur l’alcool. »

Son sourire ne quitta pas son joli visage alors qu’elle soutenait sans aucun problème le regard émeraude de son vis-à-vis. Elle l’observa faire son petit numéro après s’être redressé. Il s’en fichait ? Ce n’était pas vraiment étonnant. Beaucoup d’entre eux ne prêtaient pas vraiment d’attention aux problèmes extérieurs à Deepground. Elle en faisait partie, même si elle aimait bien fouiner dans les affaires humaines lorsqu’elle s’ennuyait. Lors de ses permissions, il lui arrivait de se faufiler en douce hors du QG, habillée en civile, et de se fondre dans la foule qui hantait les rues de Midgar. Oh, Weiss le savait sans aucun doute, mais la jeune femme était aussi réputée pour sa discrétion et sa loyauté. Pour rien au monde elle ne dévoilerait les secrets de leur organisation, même si elle devait subir les pires tortures.

Le rouquin lui demanda son avis. Ainsi, lui non plus n’avait pas vraiment envie de s’ennuyer. Lorsqu’ils étaient assignés au poste de veilleur, tous, sans exceptions, préféraient perdre un peu de temps pour discuter afin de reculer le moment de la relève.

« Moi ? Je trouve les humains très divertissants. Ne penses-tu pas que c’est amusant de voir leur arrogance se fissurer peu à peu lorsqu’ils se rendent compte qu’ils ne peuvent rien contre toi ? De déceler la peur dans leurs yeux ? Personnellement, je vois cela comme un bon passe-temps. Ils sont tous faussement insouciants, prétendant ne pas voir les problèmes de leur monde. J’adore les observer lorsqu’on leur rappelle que la planète meurt. Tu vois leurs murs s’effondrer l’espace d’un instant, remplacés par l’inquiétude. C’est passionnant. »

Elle laissa échapper un petit rire horriblement doux. Du haut de son perchoir, elle s’allongea sur le ventre, soutenant son menton de ses mains, quelques longues mèches d’obsidienne pendant dans le vide. Elle balançait ses jambes au-dessus d’elle, telle une enfant. D’apparence, Evelyn semblait très jeune. Il était difficile de déterminer son âge. Parfois, en mission, elle en jouait. Cela perturbait beaucoup de personnes.

Elle observa Cahya, pensive. Elle se demandait ce qu’il valait, en combat. Était-il du genre à se désister en la voyant s’exciter ? Non. Il n’en avait pas l’air. Elle espérait pouvoir un jour se mesurer à lui durant un entraînement.

Relève et PotinsFeat Cahya


Décidément, ce Cahya aimait bien parler. Et il n’était visiblement pas un optimiste de nature. Il n’était pas bien compliqué pour la jeune femme de rire, et cela effrayait souvent ceux qui étaient en face d’elle. Son sourire disparut alors qu’elle penchait la tête sur le côté en l’écoutant, comme le adorable petit chaton curieux qu’elle était loin d’être. Elle se redressa sur son perchoir, et sauta sur d’autres caisses, juste au-dessus du rouquin, ses longs cheveux sombres flottant gracieusement derrière elle. De là, il lui suffisait de tendre de bras pour le toucher, et c’est ce qu’elle fit, mimant un petit personnage qui remontait le long de son bras avec ses jolis petits doigts.

« Je pense que c’est ce qui fait que nous avons un avantage face aux humains. Nous n’avons jamais appris à fuir. Et si nous suivons les ordres de l’Empereur, nous sommes largement capables de nous défendre de nous-mêmes. Les humains, eux, doivent reposer leur survie entre les mains de gens qu’ils ne connaissent même pas. Nous avons une force mentale et physique qu’il n’ont pas. »

Elle s’assit, dépassant, de son perchoir, le jeune homme d’environ une tête. L’envie lui prit de l’embêter un peu, histoire d’égayer la conversation. Mais elle sentait qu’il n’aurait pas la réaction qu’elle trouverait idéale, aussi laissa-t-elle tomber l’idée de reposer son coude sur sa tête. Elle suivit son regard, et perdit le sien dans le décor sombre qui les entourait. Midgar était vraiment loin d’être une jolie ville. L’espace d’un instant, elle se demanda à quoi ressemblait l’extérieur, les terres inconnues et lointaines qui formaient le reste du monde. Une part d’elle voulait y aller, découvrir ce qui pouvait bien s’y trouver. Peut-être seront-ils un jour assez nombreux pour agrandir leur horizon. Son léger soupir accompagna celui de son vis-à-vis, et elle nota dans un coin de sa petite caboche de parler de cela à Martial, histoire de connaître un peu son avis sur la question. Question sur laquelle elle brancha le jeune homme, qui n’avait visiblement pas l’air réticent à l’idée de papoter.

« Dis-moi, Cahya... » commença-t-elle d’une voix douce, « que penses-tu du monde extérieur ? »

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Le ton lointain qu’il employa ne fit qu’attiser sa curiosité, mais elle comprit à son regard qu’il ne valait mieux pas pousser le bouchon trop loin. Cela l’ennuya. Cahya ne semblait pas très amusant à embêter pour la sale gosse qu’elle pouvait parfois être, mais soit. Elle ferait avec pour cette fois-ci. Elle nota dans un coin de son esprit de parler de cette discussion à son cher Martial, histoire d’avoir son avis sur ces questions. Peut-être en avait-il discuté avec d’autres soldats, de son côté.

Sa question la fit sourire. Il était vrai qu’elle avait posé pas mal de question depuis le début de ce tour de garde. Mais, contrairement aux apparences, elle était en général silencieuse durant ce genre de tâche, étant donné qu’il était rare qu’elle ait de la compagnie, se perdant ainsi dans ses pensées diverses et variées débordant de sa petite caboche. Le jeune homme était l’une des rares personnes à être restées aussi longtemps pour discuter avec elle. Qui sait, ses questions avaient peut-être éveillé un tant soit peu d’intérêt au fond de lui.

 « Il m’arrive de m’échapper des sous-sols pour aller me balader à droite, à gauche. Mais je reste la plupart du temps ici, à m’entraîner, à buller dans ma chambre ou à embêter un ami. »

Son regard émeraude aux allures moqueuses l’intrigua, et elle ne sut réellement si elle devait s’indigner de cette étincelle rieuse qui y dansait ou simplement l’ignorer. Elle se garda cependant de réagir, préférant écouter les vagues descriptions de l’extérieur de son frère d’armes. Elle se mit à imaginer les champs remplis de fleurs multicolores, l’horizon irrégulière tracée par de mystérieuses constructions. Le ciel de là-bas était-il aussi gris que celui de Midgar ? Jusqu’où s’étendaient ces territoires verdoyants ? Son esprit fut comme attiré par ces visions inconnues, et elle eut comme le besoin d’y aller, une envie de découverte qu’elle eut du mal à enchaîner tant elle lui tordait les entrailles. Peut-être irait-elle, un jour. Ses grands yeux aux reflets si particuliers s’illuminèrent à ces pensées, et un petit sourire presque enfantin vint étirer ses lèvres.

« C’est peut-être pas grand chose, mais ce genre de vision a l’air d’être bien plus plaisante que celle du paysage gris de Midgar. »