CRUNCH • March of the Deathstream's child

   Ils disent tous que Jenova est notre mère, maintenant ; notre Mère à tous. Qu’on lui doit la vie, tout ça. Je trouve surtout que ce sont des conneries, un peu. Moi, ma mère, ma vraie mère, je m’en souviens. Un peu. Je crois. Je ne suis pas certaine mais je préfère me raccrocher à ce qui m’en reste, à ce qui résonne dans ma tête, parfois, le soir, quand j’ai du mal à dormir.

J’entends une voix de temps ne temps. Elle est douce, elle m’énerve. Elle me manque. Je crois.

Si mes souvenirs sont bons, je peux dire que je suis née dans un petit village paisible, qui ne demandait rien à personne et dans lequel tout le monde se connaissait et vivait en paix. Le bon gros cliché de base, quoi. J’ai la sensation que ma vie était fade, là-bas. Sans doute. Mais alors, pourquoi est-ce que j’ai la sensation que cette fadeur me manque un peu ? Je sais pas, ça m’énerve tout ça.
Qu’est-ce que je disais, déjà ? Ah oui, ma mère. Elle m’a élevée toute seule, probablement. J’ai pas le souvenir d’avoir eu un père pour veiller sur moi. Le remplaçant, c’était le meilleur ami de la famille ; Yostav. Oh, j’étais pas dupe non plus, j’ai très vite compris que lui et ma mère étaient plus que des ‘amis proches’, si vous voyez ce que je veux dire. Non, vous voyez pas ? Tant pis pour vous, fallait avoir de l’imagination en starter pack, que voulez-vous que je vous dise.

M’enfin bon. Après c’est un peu vide. Je crois que j’avais deux-trois amis, sans plus. A cette époque, je me souviens que j’avais les cheveux longs et surtout, très noirs. Ma mère me disait que c’était le cosmos qui était descendu dans ma chevelure. Elle n’avait de cesse de me répéter à quel point j’étais belle, sa fierté. On ne se ressemblait pas beaucoup et pourtant, elle me chérissait comme la première merveille du monde. Ouai, je crois que ma mère, l’ultime et la seule, elle m’adorait comme on adore une petite déesse.

Elle a dû être triste quand je suis morte. Je ne me souviens plus des circonstances exactes, mais je me souviens de la douleur, des os qui se cassent et du sang quittant les muscles pour aller inonder l’herbe. Je crois que j’ai douillé un max avant de crever ; c’est pas juste. Je ne pense pas avoir faire quoi que ce soit pour mériter ça. Mais bon, comme je n’ai pas tous mes souvenirs – ou plutôt que je ne suis même pas certaine qu’il s’agisse bien des miens -, je fais avec. Je suppose. C’est encore ce que je sais faire de mieux.

On a pas vraiment eut de gros échos sur la mort du président de la Shinra. Moi, je crois bien que j’étais comme tous les jeunes du village, je m’en fichais un peu, c’était loin pour moi, trop loin. Ce qui se passait dans les grandes villes ne nous regardaient pas, après tout. Et Vice-versa.
Mais j’ai été trop curieuse, faut croire. C’est sans doute ce qui a causé ma perte. Des rumeurs circulaient comme quoi des personnes étranges allaient vers le marais, de plus en plus. On nous a même décrit un type avec une grande épée massive sur le dos. J’ai voulu aller voir, alors, contre l’avis de ma mère, je suis sortie en cachette et en pleine nuit. Je n’avais pas peur. J’aurais peut-être dû. Car avec le sang, je me souviens d’un sifflement stressant, comme celui d’un imposant serpent. C’est sans doute cette saloperie qui a eu ma peau.
Qu’est-ce que je peux dire, sinon. Le Météore ? Jamais entendu parler avant que Sephiroth ne l’évoque. Je n’ai pas vécu ce versant de l’histoire.

Je me souviens que, lorsque j’ai rouvert les yeux, ils étaient là, tous. Et puis, il y avait ce type, dont j’ai plus tard appris le nom ; Sephiroth.

Il m’a tendu la main alors que j’étais trempée, que j’avais froid et que je ne comprenais rien à ce qui m’arrivais. J’avais la tête tellement vide – aucune remarque où c’est mes goddasses dans la tronche, capish ? – que ça en était douloureux. Il m’a aidé, m’a réchauffé et conduit en sécurité, avec tous les autres. Je me suis dit que je pouvais lui faire confiance ; après tout, quand on aide les autres, c’est que l’on est pas une mauvaise personne, pas vrai ? C’est ma logique.

Il m’a ensuite parlé de ‘notre Mère’, Jenova. Je n’ai pas tout compris, juste qu’elle souffrait. Ca a réveillé des souvenirs désagréables en moi. Les premiers. Je me suis souvenu de la douleur et du sang, du goût de fer dans le fond de la gorge et des hurlements. Je ne voulais pas revivre ça et je trouvais cruel que l’on puisse forcer quiconque à vivre ce genre de trauma également. J’ai voulu la protéger. Même si elle n’est pas vraiment ma mère, elle n’a rien faire de mal, pas vrai ?
J’ai appris à me servir de choses appelées Materias. C’est bizarre, mais pas si désagréable, au fond. Sephiroth m’a dit qu’il fallait qu’on empoisonne la Lifestream. C’est à cause de cette chose que Jenova souffre. Du coup j’ai décidé de la détruire à ses côtés. Je me dis que comme ça, au moins, personne n’aura plus à subir la souffrance gratuite, comme moi, comme elle.

J’ai pris le bon chemin, pas vrai ? Ouai, je suis sûre que oui. Il ne peut pas en être autrement.